La gouvernance adaptative
C’est la gouvernance de la véritable évolution et de l’innovation, qui se limite pas à faire « plus de ce qui marche » ou « moins de ce qui ne marche pas ». Elle permet de penser, de ressentir et d’agir autrement, au-delà des automatismes, des habitudes, des sentiers balisés. Quand nous sommes en gouvernance adaptative, notre personnalité s’exprime pleinement, sans réactivité à l’autre ou à une situation. Nous ne nous limitons pas à ce que nous pensons connaître de nous ou que nous défendons. L’autre est profondément accepté pour ce qu’il est mais n’est pas un acteur prédominant dans l’expression de notre personnalité (image sociale). A la différence des trois autres gouvernances caractérisées par leur rigidité, cette gouvernance se manifeste par notre souplesse intérieure et induit un état de sérénité. Comment réaliser, en pratique, un décodage ANC ?Voyons maintenant comment mettre concrètement en pratique les « fondamentaux » vus précédemment. La complexité humaine étant une évidence, la présentation de l’Approche Neurocognitive et Comportementale a été ici simplifiée. Le plus simple est de commencer par se faire une hypothèse de l’état mental dans lequel est la personne au moment de notre échange. Et si cet état est logiquement contextuel, il peut aussi être significatif des principaux contenants de notre interlocuteur car une personnalité ne s’exprime qu’à travers eux. Il s’agira dans un premier temps de repérer les principaux contenants automatiques de notre interlocuteur. Si la personne nous semble calme et centrée sur le présent, nous pourrions déduire qu’elle est en activation de l’action. D’une manière générale même si une personne n’est pas en stress, sa préférence instinctive peut s’exprimer et nous donner des informations sur la manière dont elle réagira face à ce qu’elle percevra comme une agression. Ainsi une personne qui privilégie le mouvement, ou dont le regard est très mobile, pourra nous révéler que sa préférence instinctive est la fuite et qu’elle est donc de nature plutôt anxieuse (état de fuite). La personne qui focalise son regard sur son interlocuteur, qui manifeste par sa posture corporelle ou sur son visage des signes de tension et/ou qui exprime facilement ses désaccords, pourrait nous révéler sa préférence instinctive pour l’état de lutte. Enfin, celle qui nous apparaîtrait plus en retrait, limitant ses mouvements et dégageant une impression de « lenteur », pourrait nous dire d’elle que sa préférence instinctive est l’inhibition de l’action. Nous avons ainsi une possible lecture des contenants instinctifs qui l’animent. Il est également très intéressant de faire une hypothèse du positionnement social spontané de notre interlocuteur. Ainsi une personne dont on sent qu’elle prend possession de « son » espace ou prend le dessus sans raison apparente sur son interlocuteur, pourrait avoir un positionnement grégaire « dominant » ; celle qui s’excusera ou se mettra facilement en cause, et ceci sans raison apparente, pourrait avoir un positionnement plutôt « soumis ». Une personne qui apparaîtra naturellement en retrait et ne s’ouvrira pas spontanément pourrait avoir une tendance « marginale » ; celle qui, au contraire, se connecterait et ferait rapidement part de sa capacité à « ressentir » les autres, se révèlera certainement « intégrée ». Le positionnement grégaire est très puissant et rigide. Il correspond au « c’est plus fort que moi » et aura tendance à s’exprimer naturellement dans la plupart de nos interactions spécialement en groupe, encore plus dans une relation inconnue. Bien que ces différents contenants instinctifs et grégaires vont essentiellement s’exprimer dans un moment où notre cerveau en percevra la nécessité, ils sont toujours prêts à intervenir. Ils fonctionnent de fait comme un radar qui décidera s’il y a un enjeu à intervenir. Ils sont pour la plupart d’entre nous toujours très présents, c’est pourquoi ils sont intéressants à repérer. La gouvernance émotionnelle, s’exprimant notamment à travers nos motivations intrinsèques et extrinsèques, est normalement plus apparente car elle définit notre relation à ce qui nous semble bon pour nous et exclut très facilement ce qui nous semble être un obstacle à notre plaisir. Si notre interlocuteur nous paraît « occupé » ou « sérieux » nous pourrons faire l’hypothèse qu’il a une tendance dite « empêchée ». Si en plus il nous semble centré sur lui, nous pourrons affiner notre hypothèse sur deux des motivations possibles : « novateur » dans le cas où il privilégie la réflexion et la pensée, « gestionnaire » dans le cas où il a un goût prononcé pour l’organisation et l’optimisation. S’il semble occupé ou sérieux et qu’on le sent avoir besoin de l’autre pour se challenger et être efficace, il sera alors qualifié de « compétiteur », s’il a besoin de satisfaire les besoins des autres, il sera qualifié de « solidaire ». Si, au contraire, nous repérons une forme de légèreté, nous ferons l’hypothèse d’une modulation réussie : « philosophe » dans le cas où il privilégie le fait de profiter de la vie et ce qu’elle propose, « animateur » dans le cas où il privilégie le mouvement sous toutes ces formes. S’il a toujours cette même légèreté mais qu’on le sent attiré par le fait d’entraîner le plus grand nombre vers quelque chose de « grand », il sera qualifié de « stratège ». Si en plus de cette légèreté, il met en avant la sensibilité et les relations affectives, il sera dit « participatif ». Bien entendu nous pouvons avoir plusieurs de ces motivations mais certaines d’entre elles ne nous « parlent » pas. Nous désignerons comme « motivations primaires » les motivations qui s’expriment naturellement, nous donnent de l’énergie et nous font agir avec le sourire ; et comme « motivations secondaires » les motivations qui accordent beaucoup d’importance au résultat ou qui expriment une intolérance, un rejet de ce qui s’oppose à nos valeurs (ce qui compte vraiment pour nous). Par simplification, nous avons tendance à nous focaliser sur les motivations primaires, profondes et durables, au détriment des motivations secondaires, plus fragiles car sensibles au résultat de l’action. En revanche, en vertu de l’importance de notre éducation ou de nos expériences de vie, elles occupent naturellement l’espace en s’exprimant avec facilité. Ainsi, hormis le cas des vraies « vocations » (fruits de motivations intrinsèques), le choix de nos études et de nos premières expériences professionnelles a souvent été fait en fonction de raisons qui nous sont extrinsèques (sous l’influence de notre famille, de notre milieu social, etc.) et correspondent donc à des motivations secondaires. Plutôt que de l’interroger sur son métier, c’est mettre une personne à l’aise, et l’observer lors des temps de pause, qui pourra généralement nous permettre d’identifier ses principales motivations primaires. En effet, elles correspondent à une idéalisation d’un état qu’elle va spontanément chercher à retrouver en adoptant tel ou tel comportement : elles transparaissent souvent dans les activités (hobbies, action caritative…) que nous faisons lors de nos temps libres. Et s’il nous semble que la personne n’a pas de réel dynamisme sur le sujet évoqué, nous identifierons des velléités, ces motivations tertiaires qui ne sont pas de réelles motivations. Enfin, pour décoder notre interlocuteur, il semble important d’évaluer son aptitude à passer en gouvernance adaptative : repérer sa facilité ou sa difficulté à sortir de son mode automatique et pouvoir ainsi faire preuve de souplesse. Par souplesse, nous n’entendons pas ici strictement le contraire de la rigidité mais une capacité à intégrer des informations nouvelles qui modifieront peu à peu nos perceptions et, au final, nos comportements. Aller vers ce qu’il ne connaît pas (curiosité), intégrer ce qui n’est pas attendu (acceptation), imaginer d’autres hypothèses (nuance), remettre en question ce qui lui semble certain(relativisation), comprendre comment il réussit ce qu’il fait ou ne réussit pas (compréhension), exprimer pleinement sa personnalité sans se limiter au cadre de l’attendu (individualisation) sont les principales dimensions qui nous permettra de nous faire une première idée sur la facilité de notre interlocuteur à solliciter son intelligence adaptative. Une fois que nous avons identifié les principaux contenants qui animent la personne, il est important de déceler ceux qui, lors de notre entretien, prennent le leadership, c'est-à-dire quelle gouvernance est à l'œuvre à ce moment-là. Dans le cas où il s'agit d'une gouvernance (instinctive, grégaire ou émotionnelle) relevant du mode automatique, l'objectif est d'essayer de la faire passer en mode adaptatif ou, du moins, lui permettre de prendre un peu de distance par rapport aux contenants automatiques qui l'habitent alors. Cela peut être fait explicitement à l’aide de la pédagogie ANC, ou implicitement grâce à une technique de communication ANC, nommée « communication ouvrante ». La personne retrouve ainsi des « libertés perdues » et la capacité à décider avec davantage de lucidité et de sérénité. En conclusion Comme toute démarche scientifique et à l’image de l’Analyse Comportementale du Docteur Paul EKMAN (https://www.eiagroup.fr/domaines-expertise/analyse-comportementale/), l’Approche Neurocognitive et Comportementale du Docteur Jacques FRADIN fonctionne par hypothèses qu’il convient de tester et d’affiner au fur et à mesure, en interaction avec la personne. Il est important en effet de préciser que nous avons tous une capacité à faire des hypothèses mais que, sans validation de la personne… et à la condition qu’elle se connaisse bien…, cela ne reste que des hypothèses. Ecrit autrement, si nous pouvons avoir une capacité à repérer les comportements de nos interlocuteurs, soyons toujours prudents sur ce que nous sommes persuadés de voir, sur nos interprétations de cette « réalité perçue », et ne limitons pas nos interlocuteurs à ce que nous pensons connaître d’eux. Soyons attentifs aux subtilités de leur fonctionnement dans tel ou tel contexte… La notion de contexte est en effet un autre point commun fondamental entre ces 2 approches. Vous venez de lire le septième et dernier extrait de cet article. Pour en découvrir la version complète, téléchargez gratuitement le PDF :
Les commentaires sont fermés.
|
AuteurPascal Vancutsem est spécialisé dans l’accompagnement de managers, de dirigeants et de personnalités pour la construction de leur stratégie personnelle. Archives
Juillet 2023
Categories
Tous
|